Tibet, le Kham et l'Amdo

Le voyage au Tibet oriental était un voyage organisé par une agence Française. Le thème du voyage était sur les "Traces d'Alexandra David-Neel, dans le Kham et l'Amdo". Nous devions aussi assister à des festivals se tenant fin juillet et début août. Le groupe était composé de 12 personnes, 3 anglo-saxons, 7 français et deux accompagnateurs, l'un écossais et l'autre français.  Ces deux accompagnateurs avaient participé au tournage du film "Sept Femmes au Tibet" réalisé par Marie Jaoul de Poncheville dont elle a publié un livre du même titre.

Le circuit a été réalisé en 1990, du 21 juillet au 21 août. Le transfert a été fait par les moyens de transport habituel de Paris à Hongkong, Canton et Chengdu. A partir de Chengdu, le voyage a été effectué en jeep par les routes 317, 214 et 213 jusqu'à Lanzhou. Le retour a pris les mêmes moyens de transport pour Canton, Hongkong et Paris.

Le récit est en six tableaux. Les commentaires généraux sont donnés par la présentation du Tibet.

Hongkong, Canton, Chengdu

Chengdu

L'approche: Le trajet pour Hongkong fut un vol Cathay Pacific qui partit de Londres où nous avons retrouvé le groupe d'Anglo-saxons, les trois clients et l'accompagnateur écossais spécialiste en Tibétologie. Il faut préciser que les clients étaient en réalité un couple d'Américains et un Anglais. Le groupe de clients français était composé de 6 femmes et moi.

Hongkong, ville étape par excellence pour tout voyage en Asie, a été visitée plusieurs fois lors des voyages en Chine, Hongkong.

Canton, est l'une des villes pour entrer en Chine. Canton a aussi été visitée plusieurs fois.

Chengdu, fut une étape du voyage de la route du Sud, Chengdu


Parler de voyage ne serait pas le mot juste, il faudrait parler d'expédition tant le voyage fut difficile, plein d'imprévus. L'expérience acquise par les deux accompagnateurs lors du tournage du film ne fut pas de trop pour surmonter tous les obstacles.
Les moyens de transport furent trois véhicules tout terrain pour les douze personnes, un grand bus pour contenir les bagages et aménagé en salle à manger et de repos, un camion de soutien transportant le carburant pour tout le voyage.
Les conducteurs des trois véhicules servaient aussi de "guides" dûment accrédités par les autorités chinoises, ils avaient fait parti de l'expédition du tournage du film dans la même région du Kham et de l'Amdo.

De Chengdu à Kantze

L'approche:  Le groupe prit ses quartiers dans les trois véhicules pour le long périple qui nous mena de Chengdu à Lanzhou. Très rapidement les difficultés survinrent. Après Ya'an les pluies diluviennes avaient raviné la montagne, provoquant des éboulements de rochers et le grossissement des torrents. Nous nous retrouvâmes bloqués devant un gué infranchissable avec plusieurs dizaines de camions de chaque coté. La situation fut résolue après plusieurs heures d'attente par l'arrivée d'engins de chantier.

Ya'an: La ville, première étape du voyage, est encore située dans la région du Sichuan. Après le col Kaka Bouddha-La, +3.000m, une vue superbe sur le Minyak-Kangkar, 7.556m d'altitude, donna le contexte du voyage dans cette région.
Luting est considérée comme la ville frontière entre le Tibet, Kham, et la Chine, Sichuan. La frontière naturelle est matérialisée par la rivière Ngul-chu enjambée par un pont de fer.

Dartsedo: Comme la plupart des villes du Kham intégrées dans les régions chinoises, chaque localité est connue sous le nom tibétain et le nom chinois. Darsedo est appelée Kangting et nommée Tatsienlou par Alexandra David-Neel. Les habitations tibétaines traditionnelles sont progressivement remplacées par le standard chinois. Sept monastères ont survécu au temps et aux différents outrages. Les deux plus grands furent visités.
Ngachu, monastère Gelugpa, a été restauré dans un passé récent.
Dordrak, monastère Nyingmapa, était en restauration lors de notre passage.
La mission catholique, toujours en activité, a été le refuge d'Alexandra David-Neel pendant la Seconde Guerre Mondiale, du 04 juillet 1938 à 1943 . Elle écrivit de nombreux livres.

Pel Lhangong:  Le monastère, Tagon-Si, aurait été construit à l'époque de Songsten Gampo sur les ordres de sa future épouse, la princesse Wencheng. Appartenant à l'école Sakya, il possède une statue du Bouddha dans la position couchée, "L'esprit au repos".
La route n°317 poursuit sa montée vers le plateau en traversant de nombreux villages en pleine mutation chinoise.

Kantze: Le rattachement du Kham au pouvoir de Lhasa a été réalisé à l'époque de la vassalité Mongole du 17e siècle. Deux Dzongs ont été construits dont il ne reste plus rien. Un petit temple, Da Gompa, daterait du 9e siècle. Il a un atelier de xylographie.
Le monastère, de l'école Gelugpa, est accroché à flanc de montagne avec les cellules des moines étagées au pied. L'accès se fait par un étroit et raide sentier serpentant entre les habitations des moines. Ce type d'urbanisation monastique  est commun dans toute le Tibet. Je l'ai retrouvé au Ladakh. Le monastère, en activité avec environ 700 moines, comprend de riches collections d'art, statues, peintures et une importante bibliothèque.

Ya'an

Dartsedo

Pel Lhangong

Kantze


La première partie du voyage permit de prendre conscience des conditions du voyage dans une région qui n'était pas encore ouverte au tourisme. L'hébergement, comme prévu, fut soit dans des hôtels rudimentaires, soit chez l'habitant, soit sous la tente, quand les conditions climatiques le permettaient. A cette latitude, la mousson se fait encore sentir, la pluviosité était abondante, expliquant la richesse des prairies.

De Pelyul à Derge

Pelyul

Katok

Derge

L'approche: La route n°317 a été quittée pour aller au monastère de Katok où nous avons séjourné plusieurs jours pour assister au festival. Le village de Horpo, 3.200 m d'altitude, est à l'embranchement de la piste pour les deux étapes suivantes.

Pelyul: Le monastère fut atteint à partir du village de Horpo en suivant le Yangste. Il a été fondé en 1665 par le Roi de Derge, il est rattaché à l'école Nyingmapa. Il a été entièrement reconstruit en 1981. Il contient quelques belles statues, notamment de Padmasambhava qui aurait caché des écrits retrouvés par la suite et appelés terma  trésors cachés.

Katok Dorje-Den: Le monastère, 4.000m d'altitude, fut atteint après trois heures de marche ou de cheval, selon la préférence des participants. C'était le festival annuel. Notre arrivée avait été annoncée par le bouche à oreille. Lorsque notre groupe fut en vue du monastère, les pèlerins accoururent à notre rencontre pour nous porter en triomphe jusqu'au monastère. Le site, entouré de montagnes, construit sur un plateau rocailleux, est magique dans l'élégance de ses bâtiments élevés sur un éperon. Pendant trois jours nous avons assisté au festival en l'honneur de Padmasambhava, danses rituelles sur l'esplanade du temple. Nous étions logés dans les dépendances donnant sur la place du festival.

Derge: La ville, 3.300m d'altitude, est au bord d'un torrent impétueux, Zi-chu. Des maisons sont construites en surplomb de la rivière. La ville fut la capitale d'un Royaume très influent jusqu'au 18e siècle. Elle possède deux temples, Lhundrupteng et celui dédié à Tsangtong Gyelpo, qui fut un tertön, découvreur de trésors, littérature sainte cachée.
Parkhang:
L'impression du Kanjur et du Tanjur est l'activité la plus importante de Derge. L'imprimerie est installée dans un bâtiment provisoire en attendant l'achèvement de la restauration du bâtiment originel. Le site de Derge a été la cible des Gardes Rouges.


La route qui nous mena à Derge ne fut pas sans imprévu, éboulements de rochers, gués, routes effondrées. Le point culminant fut atteint lorsque les autorités Chinoises ont exigé du group leader des documents d'autorisation de circulation que nous n'avions pas et en conséquence nous sommes restés à l'hôtel, en détention,  pendant trois jours dans l'attente de l'aboutissement de négociations, toutes asiatiques. Il faut laisser du temps au temps. 

De Manigango à Mado

L'approche: Le trajet reprit la route n°317, pour quelques kilomètres, jusqu'à Manigango pour continuer par une piste jusqu'à l'important carrefour routier de Shewu où nous avons pris la route n°214 en direction de l'est jusqu'à Huashixia.

Manigango: La route allant à Manigango franchit le col Tro-La, 4.916m d'altitude, et longe le lac sacré de Yilhun Lhasto entouré de pierres gravés du mantra " Om mani padme hum". L'immense plaine entourant le village est le lieu de rassemblement en août de nomades et de cavaliers Khampa. Le temple Yaser Gompa dépend de Dzogchen.

Dzogchen: Situé à 4.000m d'altitude, le monastère Nyingmapa a été fondé au 17e siècle. Les bâtiments sont en cours de restauration. L'édifice principal possède des poutres de bois finement sculptés, qui soutiennent la partie centrale de la salle de prière. Dans la montagne le collège d'enseignement, Shrisimba, est entouré d'un mur en terre. Le groupe a eu le privilège de rencontrer le Rinpoche  en audience privée et de recevoir sa bénédiction.

Shewu: La ville au carrefour des routes est un centre de commerce et de transit. Lors de notre passage le festival de début août était achevé depuis la veille. Le retard était la conséquence de notre "captivité" à Derge décidée par les autorités.
Drogon, le monastère est rattaché à l'école Ningmapa. L'ensemble, conforme à l'architecture de Kantze à flanc de montagne, a été restauré en 1981.
Nyi-dzong, est un temple rattaché à l'école Drigungpa Kagyu.

Jyekundo: La ville est aussi connue sous le nom de Yushu. Situé à 3.800m d'altitude elle hébergea Alexandra David-Neel de septembre 1921 à juillet 1922 bloquée tant par l'hiver que par le refus des autorités de la laisser continuer son voyage. Ville caravanière, elle est devenue la préfecture de la région de Yushu en 1951.
Jyeku, monastère Sakyapa a été construit en 1187. Il fut détruit par les Gardes Rouges.

Mado: La ville, aussi appelée Madoi, est une ville de garnison. Nous avons été hébergés à la caserne à près de 5.000m d'altitude. Elle fut une ville étape avant de prendre la piste à partir de Huashixia pour rejoindre Ngawa par Darlag et Parma.

Rinpoche

Shewu

 

Paysage


Cette partie du voyage fut marquée par la visite du merveilleux monastère de Dzogchen et l'audience de son "Supérieur" ayant le titre de Rinpoche, ou "Précieux". La visite à Jeykundo a revêtu une sorte de retour en arrière pour voir où Alexandra David-Neel avait passé près de dix mois bloquée par les autorités.

De Huashixia à Labrang

Darla

Ngawa

Labrang

L'approche : La ville d'Huashixia est le carrefour de routes vers le sud est pour aller à Longriba rejoindre la route n°213 et pour remonter vers le nord est pour visiter le monastère de Labrang.

Darla: La ville est une étape caravanière encore de nos jours pour les caravanes de Yaks que nous y avons rencontrées, menées par les farouches Khampa.
Cette ville est aussi chère à mon coeur, le groupe fêta mes 50 ans, le 10 août 1990.

Ngawa: En plein pays Golok, la ville est située sur un riche plateau de cultures et possède de nombreux monastères dignes d'intérêt: Un temple Bön et un de l'école Gelugpa, Setenling, dont la bibliothèque possède une édition du Tanjur de Derge.

Dzoge: La ville, connue sous le nom de Zoige, est réputée pour ses plantes médicinales.

Labrang: Le monastère, connu sous le nom de Labuling Si, a été fondé en 1709. Construit au pied de la montagne près du village de Xiahe, il couvre une superficie de 87 hectares et abritait jusqu'à 3.000 moines. Sur les 63 bâtiments du site, il n'en reste plus que 15 après les saccages de la Révolution Culturelle.  La bibliothèque comptait environ 20.000 ouvrages. Les édifices les plus intéressants sont le temple d'or et la grande salle d'assemblée. La cour des débats philosophiques retentit, de nouveau, des joutes oratoires des étudiants lors des examens devant les grands maîtres.
Alexandra David-Neel séjourna à l'auberge du village du 30 mars au 4 avril 1921 avant de partir à Jeykundo qu'elle atteignit le 15 septembre 1921. Elle était parfaitement intégrée à la population après son séjour de deux ans au monastère de Kumbum.


Le trajet fut particulièrement difficile sur une piste sans indication de direction où le groupe des cinq véhicules, les trois jeeps, le bus et le camion se sont dispersés pour ne se retrouver que tard dans la nuit à l'étape de Longriba. De plus, c'est dans cette ville que les chauffeurs de tous les véhicules nous abandonnèrent avec nos bagages à l'hôtel.
L'explication de cet abandon procéda de la tension depuis Darla entre les chauffeurs chinois et la population Golok de la région. La stature des Golok, puissants nomades et redoutables guerriers, effraya  les frêles chinois qui ont fui la nuit vers Lanzhou.
Le voyage se poursuivit en bus local loué à cet effet, nous n'étions qu'à deux jours de Labrang avec une étape à Dzoge.

Lanzhou, Canton, HongKong

L'approche : Le trajet de retour prit le chemin inverse, l'avion pour Canton, le train et la marche à pied pour Hongkong.

Lanzhou fut visitée lors du voyage de la Route de la Soie. Le retour à Lanzhou après la visite du monastère de Labrang fut l'occasion de faire le détour par Yongjing pour visiter:
Les grottes de Biling Si et la statue du Bouddha géant, de 27m de haut: Les travaux de construction commencèrent à la fin de la dynastie Wei, (386-534) pour continuer sous les Tang (618-907) et pour se terminer sous les Ming (1368-1644). Cet ensemble est dans le fantastique décor des gorges du fleuve Jaune taillées par les eaux dans la montagne de couleur bleue, ocre, jaune.

Canton: La ville de Canton a déjà été l'objet de commentaires.

Hongkong: La ville de HongKong a déjà été l'objet de commentaires.

 

Biling Si


Le premier voyage au Tibet a été la découverte du monde Tibétain, la vie civile imprégnée de religiosité Bouddhiste, les Cavaliers Khampa et les redoutables Golok, les monastères, intégrés au paysage de montagnes, construits en espalier face au sud pour bénéficier de la lumière et de la chaleur du soleil, les paysages exceptionnels.
Toute une organisation millénaire a été mise en place pour survivre à plus de 4.000m d'altitude, près des dieux.


Le retour en France a été effectué, en vol Cathay Pacific via Londres puis Paris.

Neuilly, le 2003/09/13